Combien de lecteurs pugnaces digéreront sans faiblir le rapport romand sur Pisa 2009 ? La lecture des journaux au lendemain des conférence de presse présentant cette enquête nous éclaire à ce sujet. Les résultats sportifs, comme souvent, priment sur le travail de fond. Les classements intercantonaux suffisent largement au bonheur des plumitifs. Pourquoi s’embarrasser d’analyses compliquées alors qu’un podium de lauréats comble la curiosité du plus grand nombre ? Un titre accrocheur du style : And the winner is… et quelques cocoricos précèdent l’emballement des rotatives. Les commentaires biberonnent au même tonneau simplificateur : plus de temps d’école = meilleurs résultats. Ne venez pas nous parler de composantes socioculturelles, de traditions familiales ou d’investissement du corps enseignant. A l’ombre des clochers valaisans, la prière est simple : Protégez-nous Des Genevois (PDG) ils sont à Arolla lorsque nous franchissons Riedmatten, congratulons-nous et restons les meilleurs à chaque édition.
Un discours différent résume les analyses des Conseillers d’Etat en charge de l’éducation. Autour des diagrammes circulaires synthétisant les résultats, chacune et chacun part à la pêche aux nouvelles rassurantes et trouve son bonheur. Les champignons sont plus goûteux que la dernière fois, les tomates d’un arôme nouveau, les artichauts d’un fondant délectable. Le diagramme devient PISA quatre saisons et remplace la fondue en répandant la bonne humeur dans tous les départements. Les derniers sont moins derniers qu’avant et les premiers sont encore plus premiers c’est la mélodie du bonheur version OCDE.
Et pendant ce temps-là, que se passe-t-il dans les classes ? L’avenir fait son nid : nouveau plan d’étude, nouvelle langue étrangère, nouvelle loi pour le début de la scolarité… Ces nombreuses mutations inquiètent certains penseurs. Promoteurs de l’immuable, ils en oublient la latine formation qui forge souvent leur argumentation. Tempora mutantur et nos mutamur in illis* pas si fous ces romains ! Ils ne craignaient ni les nouvelles stratégies ni l’abandon des méthodes dépassées. Serons-nous aussi audacieux dans les nouvelles grilles horaires ? L’école de demain devrait nous permettre de varier les plats. La pizza trop chargée n’est pas toujours recommandée par les gardiens de la diététique. A long terme, elle dote les jouvencelles et les jouvenceaux d’adipeux atours qui les éloignent des sautillantes gazelles, des félines panthères ou des véloces lévriers. Certains nous diront que la placidité de l’hippopotame peut parfois séduire. Nous sommes plusieurs à privilégier légèreté et vivacité pour aborder les terres à conquérir. L’humour peut nous guider dans la réflexion. Celui de Francis Blanche a des vertus roboratives : "Face au monde qui change, il vaut mieux penser le changement que changer le pansement."
* Les temps changent et nous changeons avec eux.
Didier Jacquier
Président SPVal