"Les enseignants romands se disent étouffés par l’administration" (Le Temps, 22 octobre 2013)
"Ils «tirent la sonnette d’alarme». Alors que le Plan d’études romand (PER) est mis en œuvre depuis la rentrée dans tous les cantons, «les enseignants sont écrasés sous les directives et autres instructions administratives qui l’accompagnent», estime le président du syndicat des enseignants romands (SER), Georges Pasquier.
Le problème est particulièrement aigu à Genève et dans le canton de Vaud, assure Georges Pasquier, «où les autorités en viennent à tenir les enseignants par la main». Pour le syndicaliste, le phénomène part d’une bonne intention, celle de s’assurer que la mise en œuvre du PER se déroule correctement. «Le PER est une bonne chose. Il est organisé par domaine plutôt que par discipline, il est orienté sur la formation générale et il s’intéresse davantage à ce que l’élève doit devenir qu’à ce que l’enseignant doit faire.»
«Mais malheureusement, la multiplication des tracas administratifs qui l’accompagnent pousse certains enseignants à baisser les bras», promet Georges Pasquier. Et d’illustrer son propos: «Certains renoncent par exemple à organiser les sorties d’observation en forêt – qui vont pourtant dans le sens préconisé par le PER – à cause de la multiplication des formulaires à remplir. C’est de la surenchère, ça devient beaucoup trop tatillon. C’est tout juste s’il ne faut pas prévoir un maître nageur si la sortie se fait près d’une rivière!»
Autre exemple, ajoute Georges Pasquier, «il est question, à Genève, d’exiger un certificat de bonne vie et mœurs pour les accompagnants. On n’a même plus confiance en la capacité des enseignants à choisir eux-mêmes leurs accompagnants!»
Pour le SER, cette surenchère procédurale peut conduire à des conflits de loyauté pour les enseignants. «Dans certains cas, le problème est tel que l’enseignant doit choisir entre respecter l’esprit du PER et obéir aux directives.»
Dans son communiqué, le SER appelle «tous les enseignants à se fédérer pour s’opposer à toute démarche ne respectant pas leur statut de professionnel» et annonce qu’il «soutiendra toute action, notamment de boycott, prônée par ses associations cantonales».
Contacté, le conseiller d’Etat en charge du Département genevois de l’instruction publique, Charles Beer – également président de la Conférence intercantonale de l’instruction publique de la Suisse romande et du Tessin – ne comprend pas très bien pourquoi le SER pousse un tel cri. «J’ai l’impression que le SER monte un peu sur tous les chevaux de bataille populistes, avance-t-il. En cette période de déploiement du PER, je peux concevoir qu’il y ait ici ou là un risque d’inflation des contrôles, mais je n’ai reçu aucune demande de la part du SER sur ces questions.»
Le magistrat socialiste est très étonné que le SER monte pareillement au front en pleines vacances scolaires: «Cela ressemble à de l’agitation sur fond de trève automnale. Je suis très surpris. J’ai rencontré il y a dix jours encore la Société pédagogique genevoise et ces questions n’étaient absolument pas à l’ordre du jour.»
Charles Beer, pour qui les griefs du SER «manquent de points d’accroche», relève en outre que l’exemple du certificat de vie et mœurs exigé pour les accompagnants est particulièrement maladroit: «J’espère bien qu’il faut que les accompagnants présentent un certificat de bonne vie et mœurs! Cela fait des années que je le demande. Je fais entièrement confiance aux enseignants, mais ils ne peuvent pas tout connaître du passé des accompagnants qu’ils choisissent. Il est de notre responsabilité d’exiger un certificat.»"
Source : letemps.ch