"La HEP dans le collimateur de l'UDC" (NF, 9.11.13)
Source: lenouvelliste.ch
«Toute cette quantité de pédagogie est ahurissante. Il est temps d'écouter les gens qui dénoncent ce trop de théorie étalée sur une durée totalement disproportionnée.» Ariane Doyen, députée UDC au Grand Conseil, est pour le moins incisive avec les formations délivrées par la HEP et souhaite amener la question au niveau politique.
Avec son collègue de parti Patrick Fournier, elle a déposé une motion au Parlement pour demander de réduire la durée de formation à une seule année - contre deux à trois selon le cursus choisi - pour les étudiants au bénéfice d'un master universitaire ou d'un doctorat. Pour justifier leur mobilisation, les deux élus s'appuient notamment sur des déclarations récurrentes des étudiants, souhaitant rester anonymes.
«Ils ne souhaitent pas dénoncer une formation qu'ils sont en train d'accomplir, mais ils se plaignent de cette masse de travail immensément conceptuel. La question n'est pas de supprimer la pédagogie, mais d'en garder l'essentiel», ajoute Ariane Doyen.
Sept à huit ans d'études
Intitulé «Recalibrons la HEP», le texte entend demander une formation plus réaliste et plus courte en temps pour les futurs enseignants du cycle ou du collège. «Vous vous rendez compte? Ces étudiants arrivent au bout d'un cursus universitaire de cinq ans ou plus et doivent encore rester sur les bancs durant deux à trois ans avant de pouvoir exercer leur métier», argue la députée, elle aussi enseignante au cycle d'orientation de Crans-Montana.
Seul hic, c'est la Conférence des directeurs cantonaux de l'Instruction publique (CDIP) qui édicte les exigences et la HEP Valais ne peut pas décider seule de faire autrement. Le Valais a fait le choix d'un enseignement à temps partiel pour permettre aux étudiants d'exercer leur profession. D'autres cantons ont choisi d'autres options mais la matière enseignée reste identique. Seule une intervention à un niveau supérieur pourrait donc changer la donne?
Une question qui trouve un écho dans les propos du chef du Département de l'éducation, Oskar Freysinger, qui n'avait jamais caché que la HEP constituerait l'un de ses gros dossiers. Alors, quel sens donner à cette motion? «Celle de l'ouverture du débat. On attend de notre conseiller d'état qu'il se penche sur cette problématique et que les plaintes soient entendues», conclut Ariane Doyen.
L'heure est cependant à la patience puisque la motion n'est pas au programme de la prochaine session.
Interview :
Patrice Clivaz, un des points de la motion affirme que «la HEP crée une barrière à l'entrée inutile au métier d'enseignant et demande pourquoi des professeurs déjà en place devraient former des concurrents potentiels». La HEP constitue donc une menace pour le corps enseignant?
J'ai quelque peine à imaginer que nous soyons une menace. Si on suit cette logique, il faut alors interdire à tous les métiers différents de former des apprentis car ils constituent aussi une future concurrence. Cela fait maintenant douze ans que la HEP existe et les étudiants sont toujours au rendez-vous. Nous avons même dû refuser du monde cette année au secondaire, ce qui prouve que notre école répond aux besoins des écoles valaisannes.
Vous ne pouvez tout de même pas nier que les plaintes dénonçant un cursus trop long et trop théorique pour les étudiants qui sortent de l'université viennent de tomber. Vous vous attendiez à ce que le politique s'en mêle?
Ces remarques ont déjà été évoquées. Mais je peine à comprendre qu'on laisse entendre que le cursus soit trop long alors qu'il dure globalement le même temps qu'ailleurs et est défini par la CDIP. Simplement, nous le déclinons en emploi, ce qui favorise l'intégration pratique des étudiants. Il dure deux ans à temps partiel et permet déjà de porter la responsabilité d'une classe, ce qui est un plus indéniable. On pourrait décliner différemment mais cela nous enlèverait les avantages pédagogiques et le profil de niche du produit dans un marché concurrentiel en la matière au niveau romand, puisque les étudiants ont le choix.
Et diminuer les heures d'enseignement pour permettre d'allier pratique et théorie sur une durée plus courte?
La reconnaissance CDIP prévoit des découpages imposés et la compétence de diminution n'appartient pas à la HEP-VS. Nous avons toutefois toujours plaidé pour des formations les plus courtes possible, sans brader la qualité. A chacun ses compétences en matière de décision."
Par Julien Wicky
Deux questions pour aller plus loin :
1. Est-ce que les dépositaires de la motion ont considéré le fait que les formations pour le sec I ou II se font actuellement "en cours d'emploi"? Ce serait une info à dire, non ? Ca peut expliquer la "relative" longueur.
2. Si je veux enseigner les maths, sortir de l'uni avec un doctorat en mathématiques, c'est bien. Mais c'est insuffisant. "Faire des maths", ce n'est pas du tout "enseigner les maths." Ceux qui sortent de l'uni ont-ils l'humilité de reconnaître qu'ils doivent maintenant apprendre à enseigner leur matière fétiche ?